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«Nous ne prétendons pas savoir de quoi demain sera fait, ni
supputer les chances de la liberté dans les années à venir, mais
nous percevons encore un peu partout des signes de vie confus
et désordonnés, et des individus ou des groupes épars persistent
à exprimer malgré tout une critique sociale pertinente, dont
quelques exemples ont illustré notre propos. Et même si la
disproportion entre l'ampleur du désastre et l'indigence des
moyens qui peuvent lui être opposés est de nature à refroidir le
plus aliéné des militants, rien n'assure que la politique du grain de
sable dans l'engrenage soit éternellement vouée à l'échec, ni que
soit vaine la transmission d'un étrange héritage : la mémoire de ce
qui pourrait encore être. Dans le passé, les victimes du nucléaire ont
été intégralement dépossédées, de leur conscience autant que de
leur vie : il est pour chacun des occupations plus indignes que de
s'attacher jusqu'à la fin de son temps personnel à ce qui pourra
contribuer, si peu que ce soit, à les venger en dissipant
l'ignorance et en interdisant l'oubli. Pour cela, à qui nous
adresser, sinon aux victimes présentes - si indifférentes qu'elles
puissent être au sort commun -, mais surtout futures ?»