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Comment les Cahiers du cinéma, naguère la plus
grande revue de cinéma du monde, ont-ils pu
devenir un simple guide du consommateur ? Où
sont passées la vision et la passion qui les
avaient animés ? Émilie Bickerton raconte l'aventure
de cette revue, depuis ses débuts glorieux
jusqu'à son interminable agonie. Ses fondateurs
nourrissaient l'ambition immense d'élever le
cinéma au rang d'art et de prouver qu'Hitchcock,
Hawks ou Ray étaient les égaux des plus grands
peintres et romanciers. L'entreprise fut un succès,
et la critique devint une autre manière de faire du
cinéma, avant que certains rédacteurs, comme
Jean-Luc Godard, François Truffaut ou Éric
Rohmer, ne passent eux-mêmes à la réalisation.
La revue joua une part active dans l'élaboration
d'une théorie du cinéma, s'ouvrit au structuralisme
et à la psychanalyse, envisagea le cinéma
comme un art politique. Preuve d'un constant
désir de se réinventer et d'agir sur le cinéma en
train de se faire. À partir des années 1980, ce
désir disparaît : les Cahiers s'accrochent à un
auteurisme vide, renoncent aux idéaux qui les
avaient guidés, épousent le monde comme il va.
En faisant l'histoire des Cahiers, de leurs réussites
et de leurs échecs, de leur grandeur et de
leur décadence, ce livre propose une réflexion
nécessaire sur le destin de la critique : partout et
nulle part à la fois, elle se traîne, sans idées ni
projet. Or qu'est-ce qu'une critique digne de ce
nom sinon une intervention sur l'époque ?