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On a beaucoup étudié les diverses façons dont Paris a été perçu par
des écrivains et des poètes, mais ce n'est nullement de ces divers regards
sur la grande ville qu'il est question dans ces conférences, données
en novembre 2001 à la Bibliothèque nationale de France.
Remarquant que le XVIIIe et le XIXe siècle ont répandu par les rues et les
boulevards de Paris une foule, une «multitude», d'un caractère nouveau,
privée des signes apparents autant que distinctifs qui avaient permis aux
époques précédentes d'en reconnaître, individu par individu, l'inscription
dans l'ordre divin - dans l'être -, Yves Bonnefoy a cherché à comprendre
l'effet que ce qui semble ainsi une épiphanie du néant a eu sur quelques
poètes : estimant que cet effet a retenti au coeur même de leur expérience
le plus spécifiquement poétique, pensant aussi qu'il leur a révélé la nature
essentielle de la poésie, qui est de fonder l'être sur rien que le voeu
qu'il y ait de l'être. Un projet certes difficile à dégager des émotions et
des rêveries ordinaires. Mais que Paris a donc aidé à percevoir, au seuil
d'une «heure nouvelle» du poétique dont la conscience de soi va être
la grande tâche, autant que la cause de devenir.
L'enquête, faute de temps, s'est limitée à Gérard de Nerval et à Baudelaire,
celui-ci l'initiateur principal de cette modernité, pressentie aussi par
Edgar Poe. Mais, commençant avec Hugo et Vigny, cette réflexion aurait
pu s'étendre à Rimbaud, Mallarmé, Apollinaire, les surréalistes.