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Dans le discours qu'il prononce le 11 décembre 1968 à l'occasion de sa remise
du prix Nobel de la paix, René Cassin confère à la Déclaration universelle des
droits de l'homme la portée du «premier manifeste d'ordre éthique que l'humanité
organisée ait jamais adopté».
Soixante ans après son adoption le 10 décembre 1948 par l'Assemblée générale de
l'ONU, les professionnels de santé ainsi que tous ceux qui oeuvrent dans le quotidien
du soin comprennent le processus engagé après la Shoah comme relevant d'une responsabilité
qui les concerne de manière spécifique. Le code de Nuremberg (1947)
constitue de ce point de vue un devoir de mémoire et un appel à la vigilance.
Cette pensée pour notre temps, nécessaire face aux défis qu'il nous faut assumer
ensemble, trouve son inspiration et sa légitimité dans les combats menés contre
l'obscurantisme et la barbarie, afin de parvenir à l'avènement des droits de
l'homme. Nous sommes comptables, dépositaires à titre personnel et au sein de nos
démocraties de cette part du patrimoine de l'humanité élaboré à travers de difficiles
conquêtes encore inachevées et dont l'extrême précarité nous interpelle.
Alors que la France s'apprête à engager dans le cadre d'une concertation nationale
la révision de la loi relative à la bioéthique (2004), le recours aux principaux textes
élaborés s'avère d'autant plus indispensable que s'accentuent les incertitudes, les
peurs et les risques générés par les applications de savoirs dont on ne parvient
qu'imparfaitement à maîtriser les développements. De telle sorte qu'il ne paraît
pas insensé de se demander si les «droits de l'homme» préserveront une certaine
pertinence là où d'autres principes et finalités s'imposent insidieusement, au nom
d'un «bien» dont on n'ose plus même discuter les fondements.
Cet ouvrage s'attache à comprendre le sens d'engagements assumés par rapport à
une conception exigeante de la dignité humaine et par fidélité à un idéal qui élève,
lorsque cela est nécessaire, au-delà des tragédies de l'histoire, des désespoirs qui épuisent
les dernières forces. Il concerne donc chacun d'entre nous.
Emmanuel Hirsch
Directeur de l'Espace éthique/AP-HP,
professeur d'éthique médicale à l'université Paris-Sud 11.