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Un Américain à Lausanne, et qui plus est à la chaire de littérature française médiévale, et non pas à Polytechnique. Troublante proximité des choses lointaines ? Eric Hicks aimait à manier le paradoxe, à affirmer la parenté entre la chose médiévale et le nouveau monde. Fils de cheminot et de couturière, il refusait que les arts lui soient étrangers. Après avoir fait des études comme boursier à l'université de Yale, il y fit sa thèse avec Daniel Poirion sur l'Antiquité dans Le Roman de la Rose. Il enseigna à Yale, aux universités du Kentucky et du Maryland puis décida de vivre en Europe, fut maître-assistant à l'université de Valenciennes avant de devenir professeur à Lausanne. Tout au long de ses recherches sur des auteurs aussi divers que Guillaume de Lorris et Jean de Meun, Christine de Pizan et Villon, mais aussi sur des oeuvres comme le Tristan de Béroul, Aucassin et Nicolette, les fabliaux... Eric Hicks s'est interrogé sur les contraintes singulières qui président à l'élaboration d'une oeuvre et à la constitution même d'un sens par-delà cinq siècles de littérature et d'incompréhensions multiples. Une lecture soigneuse et généreuse des textes l'a ainsi conduit à remettre en question quelques-unes des évidences les plus naïvement assurées de la critique, dans l'espoir d'échapper, un temps, à la double illusion réductrice de l'altérité radicale et de la familiarité chimérique des textes du Moyen Âge... Toutes celles et ceux qui ont connu Eric Hicks, personnellement ou à travers son oeuvre, retrouveront également tout au long de ces pages la séduction unique de son enseignement et de son écriture, nuancée et paradoxale parfois jusqu'à la provocation : témoignage d'une pensée originale qui ne progresse qu'en se réfléchissant et qui, refusant toute certitude factice, s'efforce de ressaisir une culture à la fois proche et lointaine dans l'ambiguïté même de sa présence.
