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Chaque semaine il monte en chaire au couvent de San Marco devant la foule accourue pour l'entendre délivrer son message d'apocalypse : Florence sera punie, l'Eglise le sera aussi, le glaive divin aura bientôt raison de la corruption de l'esprit humain et des vanités du monde.
Le 6 avril 1492, après une nuit de tempête, le prédicateur dominicain se fait plus précis et annonce l'imminence de terribles fléaux. Or, le 8, Laurent de Médicis rend son dernier soupir. Deux ans plus tard, le roi de France, Charles VIII, franchit les Alpes et menace la ville...
Le prophète du millénium fait alors place à l'homme politique : négociateur avisé, il éloigne Charles VIII et réconcilie les factions ; théoricien d'une République nouvelle, il inspire la réforme des institutions. L'amnistie est votée. Tout annonce concorde et prospérité.
Mais <> : moins de quatre ans plus tard, Savonarole est arrêté, torturé, condamné par ses ennemis coalisés, la Curie romaine et les oligarques florentins. Le 23 mai 1498, il sera pendu, son corps brûlé, ses cendres dispersées dans l'Arno.
Sermons, écrits politiques et pièces du procès : les textes qu'on lira ici - inédits ou introuvables en français - témoignent de l'espérance et du sombre chaos qui s'emparèrent de Florence en ces années-là. Ensemble, ils disent la complexité d'une époque qu'on a trop souvent peinte aux couleurs d'un paganisme joyeux et d'une douce mondanité. En cette fin du quattrocento, le prieur dominicain du couvent de San Marco découvre que l'action politique s'inscrit dans une temporalité particulière et subit des contraintes propres à l'espace dans lequel elle se déploie, puis meurt en martyr de n'avoir su en tirer la leçon. Découverte et expérience décisives pour la formation de la pensée politique moderne.
