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Pour la littérature française et la gloire nationale, 1802 fut une année faste : naissance de Victor Hugo, bien sûr, mais aussi d'Alexandre Dumas. La modestie ne fut pas leur fort, ni à l'un ni à l'autre. Alexandre, mieux encore que Victor, n'a laissé à personne le soin de le mettre en scène. C'est pourquoi ses Mémoires, rédigés à partir des années 1850, sont l'un des rares ouvrages qu'assurément il ait écrit seul, et c'est pourquoi aussi ils sont demeurés inachevés, couvrant les années d'enfance et d'adolescence, où le génie pointe déjà, s'arrêtant à l'entrée dans l'âge mûr en 1832.
La matière, il est vrai, est inépuisable, car Dumas a tout vu, et connu tout le monde, de la grisette au grand cœur, qui lui donne un fils, jusqu'au duc d'Orléans, de Delacroix à Marie Dorval, de la bataille d'Hernani à la Révolution de 1830. «Mes Mémoires, écrit leur auteur, ne sont rien d'autre que les archives littéraires de la première moitié du XIXe siècle.» En vérité, elles sont beaucoup plus : un autoportrait pétri d'humour dans la démesure, une épopée de la vie quotidienne, une anthropologie familière de la France et des Français, un torrent allègre charriant les bons mots et les notations fulgurantes, un prodige de bonne humeur. Et quel rythme ! Les Mémoires sont sans doute l'un des meilleurs romans de Dumas, roman vrai autant que vrai roman, et aujourd'hui son viatique le plus séduisant sur le chemin du Panthéon.
L'édition proposée ici, sans être intégrale, contient l'essentiel des trois mille pages que comptent les Mémoires.
