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Nous partageons le problème de savoir comment faire face à autant d'humains si semblables et si différents. A autant d'êtres qui ne peuvent interpréter le fait d'exister sans se comparer les uns aux autres, sans se distinguer les uns des autres, et qui doivent néanmoins cohabiter. Et de savoir comment ces humains peuvent d'autant plus se distinguer qu'ils prennent la place successivement les uns les autres, qu'ils reprennent les mêmes traces et doivent les réinterpréter.
La première formulation du problème est plutôt celle de la problématologie, dans la mesure où elle place au centre de la condition humaine le langage ordinaire, l'incessante différence de la question et de la réponse. C'est par elle que les humains mesurent ce qui les éloigne ou les rapproche et qu'ils règlent leurs désaccords.
La seconde formulation du problème est plutôt celle de l'herméneutique, dans la mesure où elle place au centre de la condition humaine la condition interprétative, où chaque génération doit réinterpréter le monde où elle se découvre, pour reprendre la conversation rompue par la mort.
En exposant ces deux «gestes» élémentaires du questionnement, en contruisant l'écart entre deux traditions philosophiques de styles aussi hétérogènes, sans chercher à les subordonner l'un à l'autre, il s'est agi de penser une éthique de l'interrogativité. Ce sens de l'interrogation peut seul orienter nos «éthiques de responsabilité» et nous remettre ensemble dans un monde où nous comparaissons d'autant plus heureux de nous distinguer que nous nous effaçons devant l'autre. Ces deux attitudes font notre civilité.