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Le langage veut être ignoré. C'est sa destination naturelle d'être un moyen et non une fin - et ce n'est qu'au prix d'une violente conversion que la recherche peut être dirigée vers ce qui est le moyen même de la connaissance. Cette conversion qui fut le fait des linguistes ne devait pas mettre fin aux dérobades du langage. Elle conduisit à transporter au sein même de l'objet de science - langage la même distance sacrée, cette fois à l'égard des phénomènes du sens. Leur immédiateté, leur naturelle évidence étaient le plus sûr rempart de mystifications dont pouvait s'entourer le langage.
On sait que la sémiotique a pour démarche première de dénoncer cette évidence et de délimiter un objet de science au point même où se dressait le simulacre d'une appréhension spontanée du sens.
On sait aussi que désormais les opérations qui donnent forme aux phénomènes de signification ne sont plus totalement inconnues. Mais bien peu de choses encore sont remontées au grand jour des investigations qui, depuis le début du siècle, se sont donné pour tâche de mener une description rigoureuse de la sémiosis.
Mettre en jeu la sémiotique, c'était donc aussi exposer aux regards les tâtonnements et les acquis de cette très récente science humaine, c'était écrire un « bildungs - roman » d'un genre particulier, le « roman d'apprentissage » d'un projet scientifique en devenir.
