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"Quand il revint du Congo en 1970, il était décrépit. Il avait les poumons usés et le cœur affaibli, mais dans une lettre à son vice-provincial, il le supplia de pouvoir y retourner : «Je pense pouvoir guérir pour travailler encore un peu au Congo.»
"Sur une photo de cette époque, on le voit prier dans sa chambre au couvent d'Anvers, un vieil homme avec des cheveux blancs et une courte barbe, des lunettes d'écaille sur le nez. Derrière lui, sur l'étagère, en flou, un éléphant d'ébène. Il doit avoir été très seul durant ces dernières années. Je ne me souviens pas que nous soyons jamais allés le voir. Il était l'homme qui avait toujours habité au Congo. Depuis qu'il se trouvait à notre portée, un oncle comme tous les autres, aucun chemin ne nous menait à lui.
"Il est mort sans bruit. Personne ne l'a regretté. Et quand je pense à lui, il n'est jamais vieux ni malade, mais il se dresse au bord du canal, un homme imposant, vêtu de noir, enveloppé de mystère. Mon oncle missionnaire au Congo."
(Extrait.)
Partie au Zaïre - l'ex-Congo belge - sur les traces d'un oncle missionnaire dont les cartes postales ou les récits avaient coloré son enfance, Lieve Joris est aussitôt confrontée aux paradoxes de la décolonisation et à la réputation que les Européens font au continent noir. Un ton personnel et extrêmement prenant anime son récit où affleure constamment la vulnérabilité d'une jeune voyageuse qui peu à peu prend confiance. Mais ce regard de femme sur l'Afrique vaut aussi par tout ce qu'il reconstitue d'un passé révolu - ce vieux rêve d'évangélisme missionnaire dont elle ressaisit les illusions en même temps qu'elle en découvre les derniers vestiges.
