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Elle a gâché Versailles, miné Weimar et constitué le terreau
du national-socialisme. C'est la «Légende du coup de poignard
dans le dos» (DolchstoBlegende). Tout commencerait le
3 novembre 1918, par la rébellion de quelques unités de la flotte
de guerre qui aurait contaminé le pays et entraîné le 9 novembre à
Berlin la chute du Kaiser, puis l'armistice. Une victoire de révolution,
pas une défaite de l'armée allemande.
La réalité est autre. Par une analyse minutieuse des sources, inédites
en Allemagne même, Pierre Jardin révèle l'état de faiblesse extrême
d'une armée usée par les offensives menées depuis mars 1918 ; il
raconte l'élaboration d'un révisionnisme historique, un véritable
déni de défaite
Dès le début, la «Légende» a pour finalité de discréditer un régime
républicain né de la défaite. Négation de toute responsabilité allemande
dans le déclenchement de la guerre, et donc rejet de ce qui
apparaît comme le fondement même du traité de Versailles : en
faisant de la social-démocratie le responsable de la défaite, le commandement
et les politiciens conservateurs occultent du même coup
leurs propres fautes stratégiques et leur responsabilité. Dès 1918,
la «Légende» prépare les conditions d'accession au pouvoir de
Hitler. Elle invente surtout une figure historique omniprésente au
XXe siècle, celle du front trahi par l'arrière.