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«Apparue avec les États-nations modernes libéraux, la justice
pénale a régulièrement servi d'instrument de domination ou, pour
reprendre la formule de Foucault, assuré la gestion des illégalismes
populaires et de ceux-ci seulement, comme l'atteste le profil socio-économique
des populations qu'elle draine. (...) Cette manière de voir, aux
relents gauchistes démodés certes, semble pourtant d'actualité face au
constat de plus en plus lourd de la gestion pénale de la question sociale par
le développement de politiques sécuritaires qui visent principalement ces
fameux "groupes à risques". Car ce sont bel et bien eux qui, visés, sont
touchés par les réformes les plus récentes, des contrats de sécurité à la
construction de prisons, en passant par la procédure accélérée.
D'un point de vue macrosocial, difficile dès lors d'envisager
aujourd'hui une réforme de la justice autre que celle actuellement impulsée
dans le sens d'une emprise répressive croissante sur des populations de plus
en plus nombreuses, emprise débordant même les frontières de la
délinquance pour s'étendre notamment au traitement des chômeurs ou des
demandeurs d'asile. Un tel contexte doit être gardé à l'esprit lorsque l'on
parle de justice pénale, mais, aussi contraignant soit-il, il ne doit pas
nécessairement conduire à l'immobilisme. Du moins, comme pour les
statistiques ou l'Europe sociale, peut-on toujours l'espérer...»