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Il plane sur le projet européen, depuis les origines,
un lourd soupçon : présenté comme l'expression
de l'intérêt général européen, il ne
serait, dans le fond, qu'un complot des élites,
destiné à servir leurs intérêts propres et à promouvoir
leur vision du monde, au mépris et aux
dépens des aspirations populaires. De prime
abord, ce phénomène a pu paraître normal :
toute communauté politique n'est-elle pas, dans
sa phase fondatrice, soutenue par une élite agissante
? Toutefois, dans le cas de l'Union européenne,
la fracture européenne s'est stabilisée,
voire durcie. On en veut pour preuve les critiques
très virulentes dont le traité constitutionnel -
rêvé comme un moment de socialisation politique
favorable au projet européen - a fait l'objet
lors de sa ratification. Les peurs d'une Europe
perçue comme un mécanisme de modernisation
politique et économique insensible aux intérêts
des secteurs les plus exposés, aux traditions et
aux valeurs dont les territoires et les communautés
morales sont porteuses, n'ont jamais été
plus fortes qu'aujourd'hui.
Confrontés à ce rejet, et après avoir invoqué
sans succès les registres de légitimation les plus
divers, les dirigeants européens avouent leur
perplexité. Cet ouvrage n'a pas pour ambition de
leur indiquer la voie d'une réduction de la fracture
européenne, mais de mieux poser les questions.
Il réunit pour cela des contributions de
quelques-uns des meilleurs spécialistes franco-phones
des études européennes. Partant chacun
de leur objet d'étude particulier, ils apportent
des réponses aux mêmes questions : le procès
en élitisme fait à la construction européenne
relève-t-il du préjugé, ou est-il fondé ? Si elle est
avérée, quelle est la mesure de cette fracture, et
comment s'explique-t-elle ?