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Publié en 1925, soit après Le Serpent à plumes et avant L'Amant de
Lady Chatterley, L'Étalon date de la grande période créatrice de
Lawrence, et les Anglo-Saxons le considèrent depuis toujours comme
son chef-d'oeuvre dans le domaine des short novels... Ce qui rend
d'autant plus étrange sa remarquable absence, pendant longtemps, des
librairies de langue française (alors qu'il a été plusieurs fois traduit).
Ajoutons que de tous les romans de Lawrence, L'Amant... et L'Étalon
(titre original : St. Mawr) sont sans doute ceux où l'écrivain a le mieux
concentré son génie inquiet.
Lou Witt, jeune Américaine pleine de tempérament, s'est laissé marier
à un Anglais d'excellente famille (Lord Carrington - Rico pour les
intimes) qui peine visiblement à la satisfaire. Cavalière émérite, elle
soigne son spleen en passant de longues heures à l'écurie, où elle a
installé une bête à laquelle elle apporte tous ses soins : un étalon
sauvage, réputé dangereux, qu'elle ne tarde pas à apprivoiser. Un tour
de force qui lui vaut bientôt l'amitié du palefrenier, un curieux
personnage nommé Lewis, et l'estime muette de l'énigmatique Phoenix,
un Indien d'Amérique au service de Mrs. Witt.
Monter l'étalon, qui répond au nom de St Mawr, n'est pas une petite
affaire. Pour s'y être risqué un jour, l'infortuné Rico se ridiculise en
présence de toute la bonne société du royaume. Un peu plus tard, au cours
d'une partie de campagne, il trouve le moyen de se faire désarçonner
devant tous ses amis... et décide de donner à castrer l'animal...
Rarement, jamais peut-être, Lawrence se sera permis de traiter comme il
le fait, à la cravache, le puritanisme de son temps, ennemi déclaré, à ses yeux,
de ce Désir majuscule par quoi l'homme - et la femme - ne font jamais
qu'accomplir le meilleur de leur destin. Ajoutons qu'ici ce sont clairement
ces dames qui ont le beau rôle : livrées à la pleine liberté de leurs instincts,
elles n'hésitent pas à montrer à tous qu'elles en ont, et à revendre.