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Une enfance au bord de la rivière : celle de l'auteur visiblement, même
s'il ne se nomme pas - et même s'il s'amuse (peut-être) à romancer
un peu...
On vit avec les animaux - et un peu comme eux -, ou joue aux Indiens,
aux pirates, on fréquente dragons et monstres. On se risque aux
premières amours, on s'expose aux premiers conflits. On dévisage le
monde navrant des adultes. Et l'on devine à la fin qu'une méchante
porte va devoir se refermer sur tout cela...
Reste que la poésie, comme un lutin, a réussi à se faufiler sous cette
porte et trouve le moyen de nous accompagner longtemps encore une
fois la dernière page tournée. C'est elle qui nous livre ici, comme en
contrebande, cette perception d'un temps sans bornes que nous
pensions avoir perdue pour jamais : toute l'éternité du monde contenue
dans un après-midi d'août. Le plus beau cadeau, sans doute, qu'un
lecteur petit ou grand puisse se faire à lui-même.
On réédite ici Jours de rêve (composé de deux récits qui n'en font
qu'un) dans la légendaire traduction que Léo Lack avait donnée
avant-guerre au Mercure de France ; en même temps qu'on remet au
jour le chef-d'oeuvre de Kenneth Grahame (1859-1932), Le Vent dans
les saules, dans une traduction nouvelle. Une oeuvre qui se donne l'air
d'avoir été écrite «pour la jeunesse», mais dont quelques lecteurs, au
premier rang desquels Alberto Manguel aujourd'hui, ont fait leur
compagne de toute une vie.