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«Le feu de la rébellion» : cette expression, utilisée en 1768 par Auguste-Félicité
Le Prestre de Châteaugiron, avocat général au parlement de Rennes,
veut résumer les effets produits par les divers «libelles» qui accompagnent
les péripéties de l'affaire de Bretagne. Commencée véritablement en 1764,
celle-ci apparaît d'abord comme un conflit de nature fiscale mettant aux
prises les ministres de Louis XV, les États et le parlement de Bretagne. Le
22 mai 1765, la quasi-totalité des présidents et conseillers de cette dernière
institution démissionnent de leurs charges. Au printemps et à l'été, les cours
souveraines de Rouen, de Paris et d'ailleurs se saisissent de l'affaire. Le
11 novembre de cette année, cinq magistrats sont arrêtés à Rennes. Parmi
eux figure le procureur général Louis-René de Caradeuc de La Chalotais,
déjà connu pour son implication dans la lutte contre les jésuites. Ce coup de
tonnerre donne une résonance très forte à une affaire qui parvient ainsi à
s'incarner dans le destin d'un homme emprisonné et finalement exilé en
décembre 1766, après une instruction aux multiples rebondissements. Par
un tour de force étonnant, le parquetier réussit à personnifier l'opposition au
pouvoir royal et à ses agents, au premier chef le duc d'Aiguillon, commandant
de la Bretagne depuis 1753. Ce dernier démissionne de ses fonctions en
août 1768. Le parlement est rappelé en juillet 1769. L'affaire de Bretagne
s'inscrit alors de plus en plus dans un paysage national, surtout à partir de
1771, date de la mise en oeuvre de la réforme Maupeou. Elle prend fin en
1774, sous le règne de Louis XVI, avec le retour triomphal du procureur
général La Chalotais.
Le présent ouvrage, avant tout pensé comme un guide bibliographique,
examine, commente et met en relation près de deux cents publications relatives
à l'affaire de Bretagne. Ces imprimés, parus entre 1764 et 1769, sont de
tous genres : libelles, pamphlets, oeuvres satiriques, mais aussi édits, déclarations,
arrêts du Conseil et des parlements, lettres, remontrances et représentations
des cours supérieures, mémoires et requêtes judiciaires, etc.
L'analyse de ce labyrinthe textuel permet de mesurer l'importance du fossé
qui sépare le gouvernement indécis et divisé de Louis XV et ce «public» des
Lumières, toujours plus réceptif aux convulsions de la vie politique.