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Vers 1220-1230, Heinrich von dem Türlin écrit, peut-être pour la maison princière
bavaroise des Andechs-Meran, et dans la tradition littéraire de la littérature
arthurienne postclassique, un roman qu'il a lui-même comparé à une couronne,
d'où le titre qui lui a été donné par les critiques. Ce roman, «patchwork» de motifs,
d'éléments et d'épisodes de romans arthuriens classiques, mêlés à des inventions de
Heinrich, «couronne» du roman arthurien, est «le» roman de Gawein. D'une
façon comparable à celle d'Ulrich von Zatzikhoven dans son Lanzelet et à celle de
Wirnt von Gravenberg dans le Wigalois, le narrateur propose ici une multitude
d'aventures où fourmillent de dangereux adversaires pratiquant souvent la magie et
d'aimables dames ayant grand besoin de secours. Tout comme Lanzelet et Wigalois,
et à l'opposé d'Erec et d'Yvain (dans les romans de Chrétien de Troyes et dans les
adaptations de Hartmann von Aue), le héros ne connaît pas de crise. Il remporte
une série d'épreuves qualifiantes qui lui permettront d'accomplir une série d'actes
rédempteurs, qui atteignent leur sommet dans le château du Graal, monde qui reste
cependant inférieur au monde arthurien où Gawein revient à la fin de l'oeuvre. Le
roman de Heinrich von dem Türlin est un texte plein de rebondissements et de faits
inhabituels et étonnants (viol, suicide, et même une longue étreinte dans une
barque, entre autres exemples). Alors que le Pleier imite les romans arthuriens classiques,
Heinrich von dem Türlin va encore plus loin qu'Ulrich von Zatzikoven dans
l'innovation : il utilise la tradition littéraire du roman arthurien classique, non pour
la reproduire telle quelle, mais pour la modifier, y ajouter variations et corrections,
voire la parodier.