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La tragédie en musique, qui naît en France à la fin du XVIIe siècle
sous la conduite d'un compositeur, Jean-Baptiste Lully, et d'un poète,
Philippe Quinault, a connu un succès considérable, qui en fit le
premier genre spectaculaire de son temps. Au beau milieu de la
période dite «classique», il était donc permis de faire se rejoindre la
poésie, la musique, la peinture et la danse, sur une scène de théâtre.
Cependant, c'est précisément parce que cet opéra naissait dans un
contexte d'intense réflexion autour de la dramaturgie et de la poétique
du théâtre que nous voulons proposer aujourd'hui une analyse
systématique des livrets, envisagés non pas comme des textes autonomes,
exclusivement «littéraires», mais comme sources ou prétextes
à des spectacles si compliqués et apparemment si peu «réglés».
En effet, la prééminence du texte sur la musique, qui est revendiquée
par l'ensemble des acteurs de la production lyrique, est une sorte de
mystification qui oblige néanmoins les librettistes à occuper la position
cruciale d'organisateurs et de garants de l'unité dramatique du
spectacle.
Cet ouvrage expose donc les différents aspects formels et structurels
d'un spectacle qui a pu représenter l'aboutissement des pratiques
spectaculaires d'une époque, afin d'examiner comment les auteurs les
ont traités. Cet ensemble d'observations permet de présenter une
«pratique», et de réfléchir à la place cruciale qu'a occupée l'opéra au
sein de l'évolution des attentes et des réflexions sur le théâtre en
général, au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles. Il nous amène enfin à
proposer une perspective sur la dramaturgie lyrique, entendue
comme la mise en jeu des forces de la musique et de la représentation
scénique.