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Sidney Stewart, en 1942, fut l'un de ces jeunes combattants de la guerre du Pacifique, faits prisonniers par l'armée japonaise. Durant quatre ans, d'un camp à l'autre, déporté des Philippines au Japon et en Corée, il a traversé l'atrocité des humiliations et des privations jusqu'au déchaînement de cette sauvagerie qui pousse à l'animalité, sans jamais perdre la foi en la parole de l'autre. Il fut l'unique survivant de son camp et se devait de témoigner de la dignité humaine rencontrée chez ses compagnons de souffrance, non seulement pour leur rendre hommage, mais surtout «pour essayer de comprendre et de faire savoir comment les êtres humains s'efforcent de vivre et de survivre dans ces situations inhumaines extrêmes» (Joyce McDougall).
A son retour, il écrivit Give Us This Day (Nous sommes restés des hommes, publié ici en première partie), pour reconstruire du sens là où il n'y en avait plus ; pour restituer à chacun sa part de sujet quand toute humanité risque d'être anéantie ; pour retrouver, grâce à un récit, la dimension de sa propre histoire - c'est là le principe même de la démarche psychanalytique, qu'il fera sienne par la suite. Il fut psychanalyste, membre de la Société psychanalytique de Paris. On peut voir, dans les cas présentés en fin d'ouvrage, quelles audaces lui inspira son expérience du traumatisme, dans sa pratique avec des patients qui avaient connu une souffrance comparable.
Cet affrontement à la vérité ne s'est jamais séparé chez lui du besoin impérieux de sublimation, qu'il a manifesté dans ses activités d'artiste.