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L'oeuvre de Heinrich Heine, pourtant l'un des principaux auteurs de la littérature allemande, reste mal connue en France, faute de traductions fiables et récentes.
C'est tout particulièrement vrai pour Tableaux de voyage en Italie. Avant son installation en France en 1831. Heine avait écrit pour l'essentiel des poèmes et des Tableaux de voyage. Très caractéristique du style de Heine, le genre du tableau de voyage se nourrit d'une curiosité traditionnelle pour l'évocation de contrées étrangères, mais surtout il donne à l'auteur toute liberté. La description laisse la place à des digressions personnelles, dont les espaces parcourus fournissent le prétexte, qui imbriquent des impressions subjectives, des jugements politiques et de simples récits. La perception de l'étranger et la réflexion sur l'Allemagne en proie à la réaction metternichienne se mêlent en un réseau de références croisées.
Les trois tableaux de voyage en Italie, Le Voyage de Munich à Gênes, Les Bains de Lucques, La Ville de Lucques, constituent une unité, bien qu'ils aient été publiés séparément en 1829 et en 1831. Ils reposent sur les notes prises par Heine lors d'un voyage accompli de juillet à novembre 1828. Alors que l'auteur, au moment de son départ, espérait encore une intégration dans la société allemande, la fin du voyage marque une période de crise : les cercles conservateurs de Munich ont empêché que Heine ne devienne professeur et son père est mort. Une sorte de radicalisation s'est opérée dont on suit les traces dans la rédaction même. Exprimant à l'origine une fascination teintée d'ironie pour l'Italie, sorte de distanciation ironique par rapport au voyage tel que le conçoit Goethe, le texte s'est enrichi de la polémique avec le poète Platen qui avait reproché à Heine ses origines juives. Tableaux de voyage en Italie est une oeuvre majeure de Heine, qui annonce à bien des égards le départ en exil et qui mérite tout particulièrement d'être redécouverte.
